La révélation que Roberta Metzola a enfreint les règles d’éthique des eurodéputés montre pourquoi les retombées du Qatargate mettront longtemps à se dissiper.
Il y a une règle au Parlement européen. Tout député européen doit déclarer toute “participation à un événement organisé par un tiers”, à condition que tout ou partie des frais de déplacement, d’hébergement et de séjour aient été pris en charge par ce tiers. C’est ce que prévoit le code de déontologie, c’est la règle de la transparence. Là où il y a aussi des exceptions, comme dans toute règle, et elles concernent des voyages pour lesquels l’invitation émane d’institutions de l’Union européenne ou d’organisations internationales.
Mais pour respecter la règle, la déclaration doit être faite “au plus tard le dernier jour du mois suivant le dernier jour” du voyage. Des choses simples et beaucoup de temps allant d’un à deux mois pour remplir le formulaire prescrit. Bien qu’ils nécessitent un peu de paperasse, le MEP a alors l’esprit tranquille. Combien suivent la règle ?
Le Qatargate change ce qui était considéré comme “la tradition” jusqu’à présent
A Bruxelles, le scandale du Qatargate a commencé à renverser la vapeur. Depuis le début de l’année, plusieurs députés européens ont commencé à envoyer des déclarations aux services administratifs du Parlement européen avec un certain retard. Comme si le moment était venu de corriger les oublis du passé, comme le constate son reportage du journal belge Le Soir, révélateur du Qatargate et contributeur clé à la couverture de tous les développements.
Parmi ces déclarations tardives figurait celle de la socialiste belge Marie Arena, qui n’avait pas précisé qu’elle s’était rendue à Doha aux frais du Qatar (dans la foulée, elle a démissionné de la présidence de la sous-commission des droits de l’homme). Ou de Tom Vandenkendelare, membre de l’Eurogroupe du PPE, qui a tardivement fait six déclarations sur des voyages à l’étranger.
Que se passe-t-il avec le cas de Roberta Metzola
La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, il a fait en début de mois, les 11, 12 et 13 janvier, cinq déclarations pour cinq voyages dont une partie des frais a été prise en charge par un tiers. Sauf que ces déplacements ont eu lieu en mai, juin et octobre 2022. Dès lors, l’homme politique maltais est hors délai et a enfreint le code de conduite des parlementaires.
Ce qui est encore pire et embarrassant pour elle, comme le souligne Soir, c’est que le jour où elle a enfin fait ces déclarations tardives (juste après les révélations sur les voyages oubliés de Marie Arena), elle a lancé un appel ouvert via Soir et cinq autres journaux européens, “pour accroître le respect des règles actuelles à partir d’aujourd’hui.”
Ce à quoi Metsola répond : “C’est une tradition…”
Le journal belge, qui a accueilli la semaine dernière l’interview de Metsola, a contacté son bureau. La réponse qu’il a reçue est époustouflante : “Aucun président du Parlement européen n’a jamais fait cela.” Existe-t-il une disposition exemptant le président, a demandé le journal. “Non…”, a été la réponse du bureau de Roberta Metzola. “C’est une tradition”, a expliqué son porte-parole. Le site Internet du Parlement européen, note Soir, ne fait aucune mention d’une telle déclaration du prédécesseur socialiste de Metzola, David Sassoli, décédé l’année dernière.
Et pourquoi a-t-il brisé la « tradition » maintenant ? “Nous avons décidé de respecter cette règle pour montrer l’exemple, dans un souci de transparence”, conclut le porte-parole de Metsola. Ce qui n’était pourtant pas évoqué il y a quelques jours dans l’interview de Soir.
Les voyages clandestins de Metsola : Israël, Davos, Paris, Copenhague, Bourgogne
Au cours des douze premiers mois de sa présidence, elle a beaucoup voyagé. “Les dépenses de certaines d’entre elles ont été payées par le Parlement européen”, a déclaré son porte-parole, à l’image d’une série de missions que font de nombreux eurodéputés.
Les autres, ceux payés par un tiers, posent problème au président.
Du 22 au 24 mai, il a effectué une “visite officielle” de trois jours en Israël. Les deux nuits à l’hôtel ont été payées par “l’État d’Israël”, a écrit Roberta Metzola dans sa déclaration. “Lors de ce type de voyage, nous ne choisissons généralement pas l’hôtel car il y a des problèmes de sécurité”, a déclaré son porte-parole. Le communiqué indique qu’il a eu des réunions avec le président, le Premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et a prononcé un discours à la Knesset.
Aussi, en mai dernier, il s’est rendu à Davos à l’invitation d’une fondation caritative ukrainienne (Victor Pinchuk), pour une nuit.
Le 28 mai, elle est invitée par l’UEFA à Paris pour la finale de la Ligue des champions, tandis que le 10 juin, la présidente du Parlement européen passe une nuit à Copenhague, invitée par l’Alliance des démocraties, une institution qui organise un sommet international qui rassemble “responsables politiques, médias, entreprises”.
Et enfin, Roberta Metzola, a déclaré avoir bénéficié d’une nuit dans un hôtel de la ville de Beaune, en Bourgogne, à l’invitation de la Confrérie des Chevaliers du Tastevin des cinq continents et de milliers de membres unis par l’amour du vin et la promotion de produits viticoles de Bourgogne). Roberta Metzola “a prononcé un discours en tant que présidente du Parlement européen”, a reconnu son porte-parole.
Lors de la cérémonie au Château Clos de Vougeot, Metsola a été présentée comme la “Dame” de l’organisation, un titre qu’elle qualifie dans sa dernière déclaration au Parlement européen d'”activité non rémunérée”.
Le code de déontologie et les sanctions
Le code de conduite des députés prévoit que, s’il existe un quelconque indice qu’un fonctionnaire en exercice ait enfreint les règles (notamment en omettant de déclarer tout ou partie de ses déplacements comme “sponsorisés”), le président du Parlement européen doit informer le comité consultatif, qui est chargé d’enquêter sur le cas et de formuler une proposition pour l’imposition éventuelle d’une sanction.
La question qui se pose est de savoir si le président du Parlement européen aurait fait ces déclarations tardives sur les cinq voyages financés par des tiers si le Qatargate n’avait pas éclaté.
LA SOURCE: TheTOC.gr
Source: Capital
